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Sport et mimétisme : le transfert culturel en perspective

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Sport et mimétisme : le transfert culturel en perspective
  • Ce blog présente les activités de recherche, les bases de données et autres informations relatives au projet "sport et mimétisme : le transfert culturel en perspective", coordonné par Denis Jallat pour l'UFR STAPS de Strasbourg (EA 1342).
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26 mai 2008

Colonisation ou métissage dans les pratiques

Colonisation ou métissage dans les pratiques corporelles : le « texmex » ou le « hamburger » ?

L’exemple de l’éducation physique en France

Jacques Gleyse

http://corpsetculture.revues.org/document860.html

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26 mai 2008

Le projet : idées et intentions

Sport et mimétisme ; le transfert culturel en perspective.

-L’originalité et la problématique
-Choix de l’objet et ses justifications
-Les concepts et la méthode, l’originalité du travail
-Les collaborations envisagées
-En résumé (pour rappeler les idées principales)

L’originalité et la problématique
Depuis quelques années, la question du transfert culturel  est au cœur d'études de plus en plus nombreuses en histoire, en sociologie, en anthropologie ou encore dans les sciences politiques . Définie comme « le processus par lequel l'ordre préexistant de la société, ses organisations, ses croyances et ses connaissances, ses instruments et les biens de consommation sont plus ou moins transformés » , la notion est mise à parti pour étudier les processus d'acculturation; elle est également utilisée pour comprendre comment la culture  d'une société s’est construite et évolue. Des recherches très intéressantes ont, par exemple, montré la manière dont des sociétés ou des groupes sociaux sollicitent ou subissent, réceptionnent mais aussi reformulent des éléments issus d'autres sociétés ou d'autres groupes sociaux. D’autres ont montré quels étaient les vecteurs (objets, discours, images, ...) qui permettaient au transfert culturel de s'opérer . Enfin, des travaux ont mis en évidence les rapports de forces, les résistances, les jeux de pouvoir, les enjeux qui modifient les résultats du transfert culturel au moment où celui-ci s’opère, voire au moment où les premiers « effets » de ces processus se font sentir.

Cependant, des questions sont très rarement abordées dans ces études, notamment toutes celles qui se situent en amont des mécanismes de transfert. Quelle culture imite-t-on ? Quelles sont les raisons pour lesquelles on se tourne de manière privilégiée vers l'une plutôt que l'autre culture ? Quels sont les enjeux sous-jacents à cette volonté ? Qui sont ceux qui prennent l'initiative de modifier la culture de leur pays ou de leur groupe? Pourquoi le font-ils ? Quel est le poids des éléments liés au contexte ? Quelles représentations ont-ils de l’autre qui incitent à faire comme lui ?

Le programme de recherche engagé ambitionne d’apporter des réponses à ces interrogations, notamment en prenant le sport comme exemple. Volontairement nous situerons nos travaux au moment où les choix de copier l’autre sont opérés ; c’est à dire avant que le transfert culturel ne se réalise, voire même avant qu’il ne débute réellement. Il s’agira entre autres de mettre à jour les représentations que des sociétés, des groupes ou des individus construisent ou sur lesquels ils s’appuient pour que la décision d’imiter une autre culture (le mimétisme) soit déclenchée. En effet, c’est bien parce qu’ils se font une certaine idée de ce qui se passe ailleurs que ces acteurs décident, dans un contexte et pour des objectifs définis, de faire comme « l’autre ». Et ceci, de la manière la plus fidèle possible, en tout point d’un domaine. De manière paradoxale, les mécanismes de mimétisme ne consistent que très rarement à copier l’ensemble du fonctionnement d’une société ; ils ne s’appliquent souvent qu’à un objet précis . En tout cas, les phénomènes d’imitation prennent les traits d’une reproduction à l’identique – la pré-enquête réalisée le montre – même si, par la suite, des distorsions et des décalages entre l’intention de départ et la réalisation peuvent être décelés.

Choix de l’objet et ses justifications
Les recherches prendront les pratiques physiques et sportives comme objet. Deux éléments viennent justifier ce choix.
-D’une part, le caractère souvent anodin ou prétendu « superficiel » des activités physiques, mais aussi leur malléabilité en font des objets facilement mobilisables par ceux qui veulent initier des transferts dans le domaine de la culture. De plus, construites sur l’imaginaire, sur l’émotionnel , et surtout sur une totale captation de ceux qui les regardent ou les vivent, les pratiques sportives peuvent facilement masquer d’autres enjeux. La fascination que sportifs, compétitions et exploits exercent sur les populations vient renforcer l’utilisation possible des sports dans ces processus  ; d’autant que si des rivalités entre les pays existent qui s’expriment lors des grands matchs sportifs, la question nationale sait aussi s’effacer soit lorsque votre pays d’appartenance n’est plus en liste soit lorsque l’exploit est si exceptionnel qu’il en devient incontestable et mythique. Le spectateur sportif a donc, à la fois, la possibilité d’exprimer de manière forte son attachement et sa sensibilité pour son pays mais aussi, dans certaines conditions, la capacité de transférer facilement ses émotions d’un pays sur l’autre, voire de  s’identifier aux habitants d’une autre nation et surtout à leurs valeurs. Le sport est alors perçu par ceux qui l’utilisent comme un laboratoire « d’expériences possibles » ; d’autant que les conséquences peuvent être facilement minimisées, effacées, voire retransformées (en cas d’échec ou d’erreurs à propos des effets par exemple). Ce premier type de raisons laisse penser que les pratiques physiques ont souvent été utilisées comme élément préparatoire à des processus de transfert culturel ou comme test.

-D’autres part, les sports modernes – dont « l’invention » s’inscrit dans le cadre du développement des sociétés industrielles et économiques des 19e et 20e siècles – ont, dès leurs origines, affirmé un caractère universel. Or, deux faits viennent contredire cette « vérité affirmée », ce « principe qui s’impose». Premièrement, le sport s’est développé et a été pratiqué de manière quasi exclusive par les pays occidentaux (ou sous domination occidentale) et en particulier les nations européennes jusque très tard  dans le 20e siècle. Plusieurs interrogations émergent alors de ce constat qui affinent les questions déjà soulevées : s’agit-il vraiment d’universalisme, si seules certaines nations s’y adonnent ? Ou bien, d’un « outil » pour imposer au reste du monde la domination d’une forme culturelle ? La mondialisation du sport n’est-elle pas en premier lieu une Européanisation de l’objet ? Quel est le rôle des pays européens dans la construction de l’identité sportive ? Comment cette valeur d’universalisme, sur fond de traits européens, perdure-t-elle ? Et pour rester proche de notre problématique : comment d’autres pays et notamment ceux situés en dehors de l’Europe ont-il réceptionné ce caractère prétendument universel, mais en fait européen, du sport ? Par quels mécanismes l’ont-elles adopté ? Cette homogénéisation des valeurs du sport, répond-elle d’une volonté « innocente » et bienfaisante ou encore d’un mécanisme « naturel » de moyennisation de la culture par contact et osmose ou bien de réelles stratégies ?
Par ailleurs, des travaux ont montré que, bien qu’international, le sport était avant tout une tribune des enjeux nationaux. Les grandes compétitions sportives sont, en effet, le théâtre de guerres métaphoriques où la concurrence fait rage, où les rivalités « inter-nations  » sont fortes mais aussi où la fascination, les relations et les échanges se développent. Le sport serait en fin de compte le lieu où les identités des nations se forgent  ou se renforcent, les différences se creusent, mais aussi où des rapprochements entre pays s’opèrent au gré des contextes et des nécessités . La fascination d’un pays pour un autre, sa volonté de l’imiter pourrait commencer dans le sport ou plutôt pourrait trouver dans les activités physiques un moyen « facile » pour s’amorcer. Néanmoins cet ensemble se construit sur la base d’enjeux qui dépassent très largement le seul domaine du sport. Dans ces conditions, on peut se demander quels sont les mécanismes qui ont permis de construire une relative homogénéité du sport sur le vieux continent (à partir du modèle anglais qui sert de base à de nombreuses activités) et, au-delà, une « culture » commune à tous les pays qui ferait de l’Europe une entité sans oppositions ? Comment cette culture sur fond sportif réussit-elle à se construire alors même que l’Europe connaît une période de très vives tensions sur le plan diplomatique, militaire et géographique pour les plus visibles, mais aussi de concurrences dans les domaines culturel, social et surtout économique ? Mais surtout quel est le statut du sport dans les mécanismes d’imitation (c’est à dire sa place et son rôle) ? Quels sont les enjeux sous-jacents ? Quels sont les contextes qui favorisent, pour le cas du sport, la volonté de prendre modèle sur « l’autre » ? Et enfin dans quelles mesures ce que le sport donne à voir (ces premiers facteurs qui poussent à faire comme l’autre) sont transférables à d’autres domaines ? Ce dernier point pose, alors, la question de l’autonomie relative du champ sportif . Les activités physiques sont obligées de composer avec d’autres « espaces » à qui elles imposent leurs marques ou desquels elles reçoivent des signes (normes, valeurs, alliances, négociations, …).

Les concepts et la méthode, l’originalité du travail
Pour répondre aux interrogations que nous posons ici, plusieurs concepts seront mobilisés. Ils permettront de centrer les analyses sur les moments qui précèdent le procédé de transfert déjà étudié par d’autres et que nous écartons donc volontairement de nos travaux. La notion de géosymbolisme, développée dans le cas de l’éducation physique par D. Denis , apparaît intéressante pour comprendre l’origine, le sens et les conséquences de cette volonté de regarder vers d’autres horizons ou à l’inverse de rejeter des normes venues d’ailleurs avant même de les avoir « testées ». Agrégée à l’étude des contextes politiques, économiques et sociaux  et à la connaissance précise des acteurs en présence, cette théorie offrira la possibilité de construire un schéma interprétatif pertinent et novateur des raisons qui déclenchent le processus d'imitation. Et pour aller plus loin dans cette étude des éléments qui amorcent les mécanismes de transfert culturel, l’accent sera mis, avant tout , sur le principe de mimétisme développé par R. Girard . Il renvoie à la fois à l’idée de désir et à celle de rivalité ; il explique ce qui motive les individus et justifie les sources d’inspiration qu’ils adoptent, il explique l’attrait qu’exercent « les façons de faire » d’autres nations, au point de faire, en tout point, pareil. En effet, capter la culture de l’autre, c’est à la base vouloir imiter celui-ci . Et bien souvent lui ressembler à l’identique, oubliant d’ailleurs que des contextes différents produisent des cultures différentes ou occultant ces effets. C’est donc en filigrane la question des représentations que l’on se fait de l’autre  et qui président à la volonté de prendre modèle sur sa culture qui sera également interrogée. En effet, le mimétisme prend appui sur la façon dont on s’imagine que l’autre vit, agit et pense, une sorte de modèle fantasmé plus ou moins éloigné de la réalité. La vision des choses que l’on se construit alors, ce « possible espéré » incitent à faire comme l’autre. Dans le cas du sport, les mécanismes de mimétisme expliquent entre autres facteurs, le choix des nations qui s’affrontent ou du moins les éléments qui émergent de la lutte que se livrent, sur le terrain, deux pays. Ils éclairent également les raisons pour lesquelles un sport se développe plus qu’un autre dans un pays. Ces principes sportifs ne sont pas « neutres » et en tout cas pas uniquement techniques. Ils viennent également renforcer la certitude selon laquelle le sport est un « lieu » politique.

Les collaborations envisagées
Trois éléments peuvent être évoqués, pour comprendre les raisons qui poussent à regarder « ailleurs ». Ils justifient en partie le choix des cas qui seront étudiés, leur donnent de la cohérence. Nous ne présentons ici que quelques pistes en espérant ne pas avoir perverti les idées émises par les auteurs.
Premièrement, le modèle de la « fascination » que des pays suscitent pour d’autres.
Plusieurs travaux prendront appui sur cet élément : D. Bolz, par exemple, se propose d’étudier la « fascisation » de l’Italie dans l’entre deux-guerres, non seulement dans la politique ou l’économie, mais aussi dans les domaines de l’éducation, de la culture ou des loisirs. La « révolution fasciste » s’inspira, en effet, de principes préexistants ou extérieurs qu’elle adapta ou qu’elle développa en fonction de ses ambitions. Parce qu’elles sont britanniques par l’histoire, les activités physiques ont été en partie reprises par l’Italie de l’entre-deux-guerres qui les a « fascisé ». S. Chavinier s’intéresse pour sa part au basket-ball, utilisé dans le cadre d’un processus d’américanisation de la société française et de l’Europe. Il s’agira de montrer dans quelle mesure la représentation des Européens en général, des Français en particulier à propos de la puissance des Etats-Unis (notamment dans le domaine économique) a conditionné la diffusion de cette pratique. D. Jallat montrera des processus assez identiques à propos de la voile au 19e siècle. A l’inverse A. Hofmann montrera comment le Turnen allemand a influencé les gymnastiques aux Etats-Unis et quelles ont été les transformations subies par cette discipline tout au long du siècle. Prouvant finalement que les mécanismes de mimétismes sont réversibles. Bien qu’étudiant des périodes différentes, le rapprochement des trois études permettra de comprendre les raisons qui sont au fondement des regards entre l’une et l’autre rive de l’Atlantique et surtout de s’interroger sur les conjonctures qui les favorisent (pourquoi cette fascination se développe-t-elle à la fin du 19e siècle puis au moment de la grande guerre et enfin un peu plus tard dans le 20e siècle ? Pourquoi, alors que les Etats-Unis apparaissent comme un modèle fort, un pays sûr de lui aux yeux de l’Europe, cette nation éprouve-t-elle le besoin de se tourner vers le vieux continent).

Mais les raisons du mimétisme peuvent être plus complexes. Les logiques pour lesquelles on copie l’autre ne sont pas nécessairement celle de l’admiration. Des enjeux et des « rivalités » peuvent également être à l’origine de ces phénomènes.
Au 19e siècle s’instaure l’idée, la conviction voire la croyance selon laquelle en imitant l’autre en général, l’ennemi en particulier, on peut espérer acquérir ses qualités, atteindre sa puissance, mais surtout le concurrencer, le dépasser, voire le dominer. D. Jallat émet l’hypothèse que les débats qui ont lieu au sein de la voile internationale à la fin du 19e siècle s’inscrivent dans des phénomènes d’anglophobie qui ont également cours dans les domaines politique, économique, culturel au sein desquels certaines fractions de la société française, dont font partie les yachtmen, ont une place forte. Plusieurs tentatives sont ainsi menées pour détrôner la suprématie de l’Angleterre sur les sports nautiques (importation  des Etats-Unis de voiliers novateurs qui constituent un contre-modèle aux normes d’outre-Manche, création de régates sur de nouvelles règles qui remettent Anglais et Français mais aussi Espagnols, Allemands et Italiens sur un pied d’égalité, …). Y. Drouet  montrera comment la création des Alpinis italiens en 1872 qui fait naître un nouvel enjeu entre la France et l’Italie (le contrôle de l’espace montagnard), incite les premiers à développer une véritable « contrebande culturelle », initiée notamment par l’institution militaire française (comme les Italiens elle engage un contrôle de la marche alpine, importe le ski, …). La distinction entre les différentes sphères – civile, politique et militaire permettra de différencier ce qui relève de la géopolitique, de la géostratégie et de la construction sociale dans la « menace italienne ». Dans une approche qui complète les deux études précédentes, S. Stumpp analysera les mécanismes d’imitation dans des espaces soumis à de fortes contraintes politiques. L’exemple de l’Alsace (territoire annexé à deux reprises par l’Allemagne [1871-1918 et 1940-1945]) apparaît pertinent parce qu’il mobilise des acteurs (individus, institution et notamment armée) soucieux de donner une cohérence politique, sociale et nationale à leur engagement sportif. Une réflexion sera formalisée autour des conditions d’acculturation sportive, à la charnière des référents allemand, français mais aussi anglo-saxon (qu’il conviendra de comprendre). Il s’agira d’appréhender la manière dont les groupes en « transition sociale » (entre dominants et dominés) se réapproprient certaines pratiques, certaines valeurs, dans des contextes particuliers.

Enfin, un troisième facteur intervient qui vient justifier l’imitation ; c’est celui de « l’obligation » qui, dans certaines conditions, impose d’adopter les traits de l’autre.
La construction des empires coloniaux au 19e siècle, mais aussi de nécessaires alliances entre les pays dans des moments particuliers de leur histoire (guerres, annexions, enjeux économiques, …)  obligent à adopter les pratiques de l’envahisseur. Cette vision du mimétisme sera moins étudiée dans la mesure où la conscience et la volonté en sont absentes. L’intérêt pour la connaissance sur les mécanismes du mimétisme s’en trouve donc faussé ou du moins simplifié. En revanche, T. Riot étudiera un contexte particulier ; celui qui, dans des pays sous domination coloniale, a consisté, à l’occasion  de revendications d’indépendance, à renverser l’ordre établi. Il émet l’hypothèse que ces processus de « révolution » sont initiés sur la base d’un « mimétisme culturel adapté » En effet, pour s’extraire du joug dominateur, des groupes réinterprètent les dispositifs corporels et sportifs qui leur ont été imposés précédemment. Ils les remodèlent en réintroduisant et parfois en réinventant des éléments de leur culture d’origine, mais aussi en détournant certains éléments imposés par l’ « adversaire » dont on refuse la domination. L’articulation de ces deux phénomènes qui constitueraient une culture bricolée, métissée ou syncrétique, se structure sur la base d’une concurrence mimétique qui oscille entre la culture d’origine et celle des colonisateurs. Une partie des « armes » utilisées pour dominer les populations envahies, est alors acceptée non plus comme attributs imposés mais pour être retournée contre l’envahisseur, le moment venu. Pour sa part, P. Rochard s’intéressera aux raisons qui expliquent la présence d’éléments « à la française » dans l’éducation et notamment l’éducation corporelle des Iraniens au 19e siècle. La nécessité, chez les élites de ce pays, de s’occidentaliser pour conserver leurs privilèges ainsi que les contacts nombreux qui se nouent entre le Moyen-Orient et la France offrent une piste explicative intéressante.

Enfin, il semble nécessaire de se questionner pour savoir si les mécanismes de mimétisme que nous observons dans le sport en France sont pour l’essentiel franco-français ou ne concernent que les seuls pays géographiquement ou culturellement proches de la France ou si leur existence peut être étendue à d’autres pays de l’Europe. Dans ce cadre, K.  Sjöblom  réalisera une étude diachronique des sports en Finlande, et de leur développement. D’ors et déjà des travaux ont esquissé l’idée d’une inspiration d’origine finlandaise dans le ski alpin, par exemple ; à l’inverse des activités sportives pratiquées en Finlande (comme l’aviron), dont certaines s’inscrivent dans une tradition nordiste, trouvent en fait leurs sources d’inspirations loin des frontières de ce pays ; les raisons de ce « mimétisme » restent à élucider. Cette étude permettra surtout d’esquisser des explications quant aux aspects communs des schémas de mimétisme à partir du moment où ces processus concernent de nombreuses nations de l’Europe.

D’autres propositions compléteront celles déjà énoncées ici : par exemple celle de C. Kemo Keimbou et Y. Drouet autour de leur travail sur l'Afrique ; ou celle de P. Dietschy sur la coupe de football de France.

En résumé
Le travail engagé vise, pour l’essentiel, à comprendre les processus qui se situent en amont des mécanismes de transfert culturel. Il devra permettre de répondre à un certain nombre de questions non pas sur le transfert culturel et ses résultats mais sur les raisons qui poussent à s'intéresser puis à imiter les façons de faire d'un autre pays (le mimétisme ). Quelle culture imite-t-on ? Quelles sont les raisons pour lesquelles on se tourne de manière privilégiée vers l'une plutôt que l'autre culture ? Quels sont les enjeux sous-jacents à cette volonté ? Qui sont ceux qui prennent l'initiative de modifier la culture de leur pays ou de leur groupe? Pourquoi le font-ils ? Quel est le poids des éléments liés au contexte ?
L'hypothèse adoptée consiste à refuser l’innocence des raisons pour lesquelles on regarde « ailleurs ». Les choix opérés répondent, en effet, à des stratégies bien précises, à des enjeux clairement établis au préalable qui s’inscrivent dans le cadre des relations géosymboliques  ou géostratégiques. Dès lors, il faudra aussi s’interroger sur ceux qui poursuivent ce type d’objectifs : qui sont-ils ? Pourquoi ils le font ? Et surtout quelles représentations ont-ils de l’autre qui les poussent à regarder vers lui. Le contexte prendra également une place importante comme élément déclencheur des mécanismes du mimétisme.

Les pratiques sportives sont prises comme illustration des phénomènes de mimétisme, d’une part parce que son caractère souvent anodin, affirmé « superficiel », et en tout cas sa malléabilité en font un objet facilement mobilisable par ceux qui veulent initier des transferts dans le domaine de la culture, d’autre, part, parce le sport est prétendu universel. Or, deux faits viennent contredire ce point, qui rendent cette affirmation « suspecte » ou en tout cas à questionner : les sports modernes se sont développés et ont été pratiqués de manière quasi exclusive par les pays occidentaux et en particulier européens ; par ailleurs, bien qu’international, le sport est le théâtre d’enjeux nationaux, de rivalités « inter-nations » mais aussi de rapprochements, de fascinations et d’échanges entre pays ou entre fractions sociales de pays différents. Dès lors il devient un lieu privilégié pour que des mécanismes de mimétisme puissent se développer.
Une première réflexion sur ces processus fait apparaître trois types de raisons pour lesquelles on cherche à imiter l’autre : la fascination, la rivalité et enfin l’obligation qui produisent trois types de mimétisme.

Les travaux retenus dans le cadre de ce projet permettront de visiter ces trois dimensions, en prenant appui sur les contextes, les groupes, voire les sociétés qui les engagent. Ils feront émerger les facteurs qui les expliquent. Ils devront, aussi et avant tout, mettre à jour les enjeux cachés derrière les processus de mimétisme. Les études initiées porteront sur des exemples européens. En effet, la période des 19e et 20e siècles est caractérisée par une multiplication des échanges entre pays d’Europe mais surtout par une modification du sens et des objets sur lesquels ils portent. Le système de relations entre les nations du vieux continent se complexifie au moment où ces sociétés connaissent des poussées de modernité ; des réseaux d’influence émergent qui vont dans le sens d’une « attraction » ou au contraire d’une « répulsion ». Certaines grandes « affaires politiques » en témoignent . Entre les nations d’Europe, rivalités et affrontements déjà nombreux avant le 19e siècle se poursuivent de façons différentes. La scène européenne est le théâtre d’oppositions militaires, diplomatiques et géographiques pour les plus visibles, mais aussi de concurrences dans les domaines culturel, social et surtout économique. Elle est aussi le lieu où des unions, des accords, des rapprochements s’opèrent. La question de l’identité des pays , qui se « reconstruit » à cette époque, devient un élément structurant.
Dès lors il apparaît particulièrement riche d’essayer de comprendre, à travers les exemples choisis, comment l’Europe se recompose ; quelles sont les alliances qui se nouent ou se dénouent et pourquoi, quels sont leurs enjeux sous-jacents et surtout de mettre à jour les « côtés » cachés, les sous-entendus, les intentions qui président à des échanges ou à des rejets sur le plan des pratiques sociales. A travers le prisme du sport, les relations entre la France et l’Allemagne (après 1870), entre le fascisme et le national socialisme allemand (dans l’entre deux-guerres) mais aussi entre le régime italien et l’Angleterre (même période) seront évaluées ; les luttes entre la France et l’Angleterre (à la fin du 19e siècle) et entre la France et l’Italie (même période) seront également abordées ; les processus par lesquels certains pays d’Europe se sont américanisés (fin du 19e siècle et lors du premier tiers du 20e) prendront également place dans ce travail et enfin l’étude des relations de la France avec ses colonies ou des puissances coloniales entre-elles ne sera pas négligée. Pour conclure la question sera posée, à travers un cas finlandais, de connaître la dimension « territoriale » des mécanismes de mimétisme et de ses zones d’influence.

25 mai 2008

Mimétisme ordinaire

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25 mai 2008

Bibliographie

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Comparer par le bas - J.F. Bayart

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